Au moment où se clôture le cinquantième anniversaire du festival International du Film Africain de Ouagadougou (le Fespaco), une bien triste nouvelle nous est arrivée, la disparition de Abid Med Hondo, doyen des cinéastes mauritaniens et figure éminente des pères fondateurs des cinémas d’Afrique sub-saharienne.
Son œuvre aura marqué de manière conséquente la mémoire des cinéphiles intéressés aux cinémas du sud.
Comment oublier des films clés, des films phares comme Soleil Ô (1969) ou Les Bicots nègres vos voisins, (1973) ? Des films qui ont participé à la découverte des hommes venus d’Afrique pour tenter de gagner leur vie en Europe par le public français. Des films qui ont anticipé le regard porté par les cinéastes jaillis du grand mouvement de Mai Soixante-Huit en France. Des films précurseurs puisque Soleil Ô a été filmé à partir de 1966 par un jeune inconnu, comédien et cinéaste, qui ne trouvait pas de financement pour entamer son œuvre.
Sélectionné à Cannes, Soleil Ô film audacieux s’il en est, a en conséquence été en butte à bien des censures, en Europe comme sur le contient africain. Son film osait mettre en cause les politiques d’immigrations des hommes au pouvoir au moment de sa sortie en salles, en France comme en Afrique. Le film n’en est pas moins devenu un classique.
Sa carrière de réalisateur n’a pas pu être aussi féconde que son talent le disait dès sa première œuvre, mais Med Hondo a eu la chance de pouvoir développer ses talents de comédiens de doublage pour des stars américaines comme Eddy Murphie (28 films) et Morgan Freeman (17 films)… Il fut même un temps responsable syndical des doubleurs professionnels pour le cinéma français !
L’homme qui nous a quitté ce 2 mars est une figure essentielle de l’histoire des cinémas d’Afrique, il rejoint le Tunisien Tahar Cheriaa et le Sénégalais Sembène Ousmane, au Fronton des Pères Fondateurs du cinéma et de l’audiovisuel du Continent africain.
Jusqu’à ses derniers instants il aura gardé son regard droit, transperçant, interrogateur et attentif aux siens. Un regard incisif sur le monde qui l’entoure.
Med tu nous manques déjà.
Le Festival d’Amiens se joint au deuil de sa famille et à ceux des cinéphiles du Continent.
Jean-Pierre Garcia et Annouchka de Andrade